Histoire de vampires

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Anamorphose
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Histoire de vampires

Message par Anamorphose »

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Prénom : Adora

Nom de naissance : inconnu

Nom d’adoption : Drakaine

Nom utilisé en dehors de la « Famille » : Von Hoffman

Surnom au sein de la « Famille » : Le Taxidermiste

Spoiler
Métier de surface : Embaumeuse au sein des établissements funèbres.

Classe : mage

Alignement : loyal mauvais

Age de surface : 20 ans

Age en tant que vampire : 549 ans

Race de naissance : Humaine

Archétype : vampire

Taille : 1,68 m.

Poids : 52 kg

Cheveux : noir profond, boucles vaporeuses, ils tombent jusqu’à ses chevilles

Yeux : pervenche délavé

Peau : pâle, dans les tons gris-bleus

Langues parlées en public : Le commun, l'elfique et le draconique

Autres particularités : langage du corps connu uniquement par les membres et serviteurs de la « Famille », symboles visuels précis, double discours au sein d’une conversation pouvant sembler banale.

Particularités :

* 7 tatouages qui représentent des glyphes sur 7 parties précises de son corps (L’arrière du crâne (Dissimulé sous sa chevelure), dans le dos (Au niveau du cœur), dans les paumes de ses mains et sous la plante de ses pieds).

* 2 boucles à l’oreille droite et 5 boucles à l’oreille gauche. Un œil avisé pourra remarquer que chaque boucle représente ce qu’on appelle un pêché capital (Avarice, colère, envie, gourmandise, luxure, orgueil et paresse). Un œil encore plus affuté remarquera que sur l’autre face de la boucle, se trouve une vertu capitale (Générosité, joie, charité, tempérance, chasteté, humilité et ardeur).

* 3 anneaux à sa main droite et 4 anneaux à sa main gauche. Chacun d’eux représentent un animal (Une araignée, un serpent, un corbeau, un scarabée, une salamandre, une panthère noire et un rat).

* A son cou, elle porte une longue chaîne en argent massif qui descend au niveau de son nombril. Elle se termine par un pendentif représentant un cercle divisé en 8 de façon aléatoire. Au centre des 8 parts se trouve un symbole (Ils représentent les notes d’une partition). Le médaillon peut s’ouvrir. Mais nul ne sait ce qu’il contient.

* Son pied droit porte 4 anneaux ; le gauche, en porte 3. Ils représentent chacun un élément (L’air, la terre, l’eau, le feu, la lumière, l’ombre et le temps).

* Divers ornements décoratifs (Bijoux, barrettes, bracelets, éventails, ombrelles, etc…) façonnés de façon à servir d’armes exotiques.

* Ne porte que des tenues faites sur mesure et comportant toutes des poches secrètes. Les couleurs sont choisies avec une précision d’orfèvre et ont toutes une symbolique suivant le moment où elles sont portées. Les matières sont toutes aussi précises. Ne porte que des dérivés du bleu, du rouge, du noir, du blanc et de l’or.

* A des troubles obsessionnels compulsifs qui se manifestent de différentes façons et qui peuvent complètement détourner son attention de son interlocuteur.

* Étrangement très attachée à ses animaux familiers. On notera la présence d’une arachnide timide du nom de « Madame Cyxss », d’un corbeau nommé « Kraal » et d’une vipère jaune répondant au doux nom de « Pitié ». On pourra voir, mais très occasionnellement, un gros chat albinos « Le Rouge », deux panthères tenues par des chaînes « Cirulé » et « Sanctus » et un caméléon « Tolomius ».

* Possède une importante collection d’instruments utilisés par les médecins avec une prédilection pour ceux servant à la chirurgie.

* A une aversion totale et meurtrière pour la couleur orange.

* A une passion pour tout ce qui touche aux poisons de près ou de loin (Et ce malgré que le poison n'a aucun effet sur elle).

* Est toujours suivie de « Valet », son serviteur, qui manie la discrétion avec art.
Histoire :
La nuit était transpercée par le joyau astral qui répandait sa lueur diaphane sur les pavés souillés des bas quartiers de Rune.

On entendait quelques rires fuser ici et là, relent des tavernes louches et des maisons de passe ou les filles faciles s’offraient pour un peu d’or.

Il n’était qu’un pas de plus dans ce vacarme joyeux. Une silhouette se fondant dans la masse.

Un marin ivre le bouscula :

- Olà ! Qu’est-ce qu’tu fais dans mes pattes, toi !

L’homme était visiblement bien éméché. Il puait l’alcool et la crasse, la sueur et la médiocrité.

Pourtant, un autre parfum émanait de lui. Un parfum qu’il connaissait bien : enivrant, magnifique… Insoutenable !

- Oh ! Tu m’réponds quand j’te cause !

Le marin pointa un doigt sale à quelques centimètres de son visage. Un doigt qui s’élevait comme un avertissement.

Mais son regard passait à travers la chair, ses sens focalisés durant quelques secondes sur l’environnement.

Certainement que le marin ivre n’eut pas le temps de comprendre ce qui lui arriva.
Il y eu comme une sorte de sifflement étouffé, puis, la seconde d’après, il réceptionnait le corps dans ses bras, le traînant déjà dans un coin sombre.

Un petit gémissement s’échappait encore des lèvres de sa victime.

Un dernier examen lui montra qu’ils étaient loin de la vue des mortels, et lorsqu’il sourit, la lune fit luire ses deux canines, juste avant qu’il ne les enfonce dans la chair de sa proie.

Quelques minutes plus tard, repu et débarrassé du cadavre, il reprit son chemin, fredonnant un petit air guilleret, sa cape flottant dans la brise du soir.

Il huma l’air, comme un animal qui sent quelque chose. Ses lèvres s’étirèrent en un sourire charmant qui aurait fait se pâmer quelques douces créatures. Cependant, seule l’ombre pouvait profiter de ce moment.

Sa voix, presque comme un murmure surnaturel, surgit :

- Ainsi… L’instant est venu…

Une lueur carnassière emplit l’or de ses yeux. Puis il reprit sa marche, mais cette fois, c’est à peine si on entendait le bruit de ses semelles sur la pierre.

Suivant quelque parfum subtil, il dépassa trois rues, puis tourna dans une ruelle sans issue.
Là, à quelques mètres, il y avait quelque chose dans la pénombre. Quelque chose qui gigotait.

Ses yeux avides fixèrent la petite chose juste avant qu’il ne soit assez près pour la contempler à loisir.

Elle était là, nichée sur un tas d’immondices, ne pleurant pas, se contentant de le fixer à son tour avec des prunelles rondes comme des billes. Des prunelles pervenches et dans lesquelles il ne voyait aucune peur.

Elle le fixait avec ce qu’il semblait être une curiosité innocente.

- Je savais que ce jour viendrais… J’ignorai juste quelle serait ta forme… Tu veux faire un long voyage ?

A cet instant, la petite forme émit comme un babillement. Un peu comme si elle lui répondait à sa façon. La façon qu’a un bébé de s’exprimer.

- Parfait… Alors partons ! Je ferai de toi ma plus belle réussite !

Il saisit l’enfant dans ses bras, lui souriant un instant.

L’instant suivant, ils n’étaient plus qu’un vague souvenir.

Ainsi débuta l’histoire d’Adora, enfant de la fange, et de celle du « Père », patriarche de la "Famille".


Extrait d’un écrit anonyme perdu entre les étagères de la bibliothèque de Rune :

Qui je suis et comment je m’appelle, cela n’a aucune importance.
Je suis ici le témoin de ce présent.
Mes yeux sont vos yeux, chers lecteurs, et je vous retranscris ici tout ce que j’ai pu apprendre de cette aventure.

Bien sûr, certains d’entre vous resteront sceptiques, ou ne pourrons imaginer certains faits sans douter de leur véracité.
Pourtant, oui, je vous le dis, ce sont bien les faits, ici, que je vous narre.

Mais revenons à nos moutons.

Nous sommes en l’an 49, c’est la nuit et il pleut. Pourtant, l’air est doux et la journée a été belle.

La menace de la peste a été écartée.

Les vampires qui avaient pris possession de la ville ont été chassés, brûlés et mis en fuite.

Rune connaît une renaissance et à cet instant, on peut voir encore quelques lumières derrières les vitres des demeures. Certains veillent ou travaillent encore à cette heure avancée de la nuit il semblerait.

Plongeons vers un quartier calme. Ici, l’architecture est de qualité et on peut sentir que le quartier fût riche et qu’il le sera certainement encore longtemps.

La maison qui nous intéresse… Qui m’intéresse, en fait… C’est celle un peu isolée, avec des murs d’enceinte et un peu de jardin tout autour.
C’est une belle demeure, vraiment. Ceux qui vivent là (Qui vivaient ?) ont vraiment du goût.

Passons la grille, puis le porche et la porte.

A l’intérieur, tout est sombre. Les meubles ont été recouverts par des draps blancs. Il semble que les propriétaires soient partis depuis longtemps. Pourtant, quelqu’un d’attentif remarquera que la poussière est faite.

Ca sent néanmoins le renfermé. Et tout paraît figé et fantomatique.

Dépassons le vestibule et prenons le long couloir qui mène à la cuisine. Bifurquons par le bureau, puis passons par la bibliothèque et le petit salon. Évitons de sursauter en croisant une statue de marbre et revenons en arrière, pour prendre la porte qui mène au sous-sol.

Je peux voir un sacré désordre ici. Peut-être le seul endroit qui reste crasseux, royaume des toiles où les mouches ne font pas long feu.

La pièce est vaste. On pourrait presque s’y perdre.

Dans le fond, on peut voir plusieurs tonneaux et des murs entiers de bouteilles de vins et liquoreux. Nul doute que chez ces gens-là, on devait apprécier les bonnes choses !

Mais revenons aux tonneaux. Il y en a un, en particulier, qui nous intéresse. Il a un robinet légèrement tordu. Peut-être est-il cassé ? J’en doute.

J’en doute d’autant plus qu’en le tournant, un léger bruit se fait entendre, comme un mécanisme, suivit par un glissement.

Vous l’aurez compris, nous venons de trouver un passage secret ! N’est-ce pas excitant ?

En tout cas, pour moi, cela provoque un petit picotement de satisfaction.

Il faut dire que j’ai oublié de vous dire que ma spécialité, c’est le vol.
Ha, mais pas les petits larcins, non… Je laisse ça aux amateurs !
Je vous parle des vols qui demandent de la réflexion et une bonne préparation. Du style aussi, important ça, le style !

Un dernier coup d’œil avant de franchir le passage et de refermer derrière nous alors que nous descendons à nouveau, nous enfonçant dans le sol.

Il y a une sorte de mousse luminescente qui éclaire la paroi. On sent l’humidité et l’air est moite.

La descente prend du temps et abouti à une série de galeries creusées dans le sol. Nous prendrons celle de gauche.

La découverte continue. Je suis mon instinct, un peu comme si je savais inconsciemment où aller. Pourtant, quelque chose me chiffonne. Alors plusieurs fois, je me retourne, observant la pénombre.

Quelque chose me frôle !

Je sursaute, portant la main à ma ceinture. C’est là que se trouve ma dague, on ne sait jamais.

Je ne bouge plus et j’attends un instant, le temps de me calmer, pour continuer ma recherche.

A nouveau, je sens quelque chose. Cette fois, je suis certain que cela m’a touché le dos. Je me retourne vivement, mais une fois encore, rien !

Je sens que ma respiration est plus rapide et une goutte de sueur froide dégouline sur mon front. Je retiens mon souffle. Puis il me semble entendre quelque chose.

Oui, je n’ai pas rêvé, c’est… C’est bien comme un petit air on dirait…
Un petit air guilleret…

Je regarde dans la direction du son, puis j’avance.

J’essaie de faire le moins de bruit possible. Je me glisse dans les ombres, flirtant avec ce qu’il me reste de discrétion. J’ai le dos collé à un mur froid.

Soudain, le mur bascule, pivotant et m’entrainant avec lui. Je manque de crier sous la surprise, puis je me sens glisser dans une sorte de goulot noir, chutant vers une destination inconnue.

J’essaye de me retenir à quelque chose, mais rien ne vient m’aider et je ne fais qu’écorcher mes doigts.

Il me semble que la chute dure une éternité, puis, enfin, je vois une lueur qui arrive vers moi rapidement et alors que je touche le sol durement, me cognant contre la roche, tout semble tourner et je ne vois plus rien d’autre que le néant !
A ce niveau de l’histoire, on peut voir qu’une dizaine de pages ont été déchirées. Le récit reprend un peu plus loin.
Je n’avais jamais vu rien de tel.

Je la regardais alors réellement pour la première fois. Et pour la première fois, je sentis le sang se glacer dans mes veines.

Je la regardais… Elle… Parce qu’en cet instant, je souhaitais plus que tout n’avoir jamais pénétré cette demeure, n’avoir jamais trouvé le passage, ni découvert… (Une partie du texte est effacée par l’usure).

Mais voilà, il était trop tard maintenant et impossible de revenir en arrière.
Il était trop tard…

Mes pauvres yeux en avaient vu plus qu’ils ne l’auraient dû.

Pourtant, et malgré cela, j’étais captivé par son visage dont la beauté aurait pu faire pâlir un ange. Elle leva son regard céruléen sur moi et malgré sa petite taille, je me sentis dépassé en tous points. Elle prenait tout l’espace rien que par sa prestance. Et je trahis un regard furtif vers ses courbes démentes ce qui me provoqua un soudain embarras.

Je crois que cela l’amusa quelque peu car elle sourit et je cru bien défaillir tant ce moment m’éblouit. J’en oubliais presque que j’avais en face de moi un prédateur de la pire espèce et que moi, pauvre fou, j’étais le gibier !

Il faut dire, lecteur, qu’en cet instant, je pensais ne jamais pouvoir poser un jour ces mots sur un quelconque support.

En cet instant, je comptais les minutes qui me reliaient à une mort qui serait certainement rapide et dont je préférai ne pas imaginer la douleur.

C’est à cet instant je crois que Valet vint interrompre notre tête à tête macabre.

- Ma Dame, le repas est… servi.

En disant ces mots, il me fixa et je déglutis.

Adora lui susurra quelque chose que je ne compris pas sur le moment. Mais je n’allais pas tarder à le savoir…
A nouveau, le récit semble effacé et d’autres pages sont déchirées.
…arrivé là.

Demain, c’est la fin. Mais je sais que c’est aussi le début d’un autre avenir.
Ici rien d’autre ne viendra tâcher ces pages. Ce que réserve le futur devra rester dans l’ombre et vous, lecteurs, suivez mon conseil et ne cherchez pas à vous aventurer plus loin car vous pourriez bien trouver plus que ce que vous n'aimeriez trouver.


FIN
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Re: Histoire de vampires

Message par Anamorphose »

La "Famille"

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Les murs étaient recouverts d'une sorte de fresque représentant un paradis improbable où seuls se côtoyaient le carmin, l'obsidienne et l'ivoire. Trois couleurs pour un monde vu par les yeux d'un artiste aux visions délirantes.

Il fallait passer une épaisse tenture de velours rouge pour y accéder et avoir une vision globale de l'ensemble et alors, on était frappé par l'immensité du lieu.

En levant les yeux, à environ six mètres, se trouvait un trompe l’œil représentant un ciel orageux où des étoiles sanglantes luisaient dans une nuit intense.

Des fenêtres factices reprenaient ce délire, comme pour donner l'illusion de surface.

Sur la droite, se dessinait une cheminée à la taille dangereuse. Son pourtour était fait de sculptures de marbre noir représentant des danseuses lascives. Et à la place du feu, on pouvait voir onduler une créatures aux atours troublants, faisant virevolter des voiles en deuil, sa peau trop pâle et un masque dissimulant ses traits.

Quelques spectateurs tout aussi étranges observaient les déhanchements. Ils étaient si immobiles qu'on aurait dit des mannequins de cire.

Non loin, deux violons se battaient en duel pour faire danser la belle. Leurs porteurs tout autant dissimulés derrière des loups de satin noir portaient pour seul habits une sorte de jupon ample, d'un rouge profond et à leurs poignets, des chaînes les reliaient au sol.
Sur leur torse, on pouvait voir une clé de fa et une clé de sol dont la peinture semblait dégouliner comme l'aurait fait du sang.

Au centre de la pièce se trouvait une sorte de trône en bois d'ébène et en satin pourpre. Sa conception devait être l’œuvre d'un ébéniste délirant sous effet de substances illicites. Toute sa structure était difforme et au premier regard, le meuble mettait mal à l'aise.

A vrai dire, il attirait toute l'attention, tout autant que l'être qui reposait sur son séant.

De nature elfique, le visage du "Père" affichait un rictus énigmatique. Ses yeux étaient clos et ses mains croisées devant lui.
Tels des serpents endormis, ses longues mèches d'ombre tombaient négligemment sur sa chemise d'un blanc immaculé.
Sa tenue était des plus simples pour quelqu'un de son rang. Seuls quelques bijoux en or venaient rehausser de luxe cette parure simpliste.

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A la droite du trône se tenait debout, les bras croisés, le regard fixe, un membre de la race orc à la musculature étrangement fine et sèche. On pouvait observer dans son dos les gardes de deux lames.
Il portait une longue robe noire brodée de symboles shamaniques en or pour dissimuler ses mouvements.
Sa tenue était plutôt épurée malgré sa richesse.

Sur son visage un tatouage tribal lui barrait l’œil gauche et trois anneaux d'or perçaient son oreille droite.
Sa chevelure noire était tressée et liée à l'arrière de son crâne, des plumes de corbeau terminant les pointes de ses tresses.

Parmi les membres de la famille, il était celui que l'on nommait "Cyfer".
Cyfer était de nature taciturne et parlait peu. Il n'était jamais loin du "Père" et sa loyauté envers la "Famille" relevait du sacerdoce.

Au sein de la cour des miracles ici présente, beaucoup murmuraient à son sujet et les rumeurs allaient bon train.
Il était en effet rare de voir un membre de sa race être un vampire.

Tout autant que cela était rare de voir un nain ici présent.

Pourtant, non loin, riant à s'en faire exploser le ventre, c'était bien un membre de ce peuple qui se fendait la poire.

Entouré par un harem de dames aux regards brillants, notre étrange personnage semblait faire forte impression. Dans la "Famille", il était "Otero" dit "Le Marteau" car il ne se séparait jamais d'un énorme marteau à l'aspect usé, mais non moins redoutable.

Otero était ce que l'on nomme un joyeux luron, dépravé, à l'humour décapant, toujours prêt à se faire remarquer, surtout par les belles vampires.
C'était un nain charismatique au crâne rasé et tatoué de runes.
Il portait une barbe coupée au millimètre près, courte, lui allant des favoris jusqu'au menton et passant au dessus de ses lèvres.
Il aimait à arborer des lunettes rondes dont les verres était peints en noir. Ainsi, nul ne voyait ses prunelles dorées, tirant sur le rouge.

Il affichait toujours un sourire insolent et irrésistible qui faisait qu'on pouvait lui pardonner presque tout.
Il n'était pas rare de le voir une coupe à la main, remplit de bière brune, comme si cela lui rappelait un passé révolu. Bien sur, le liquide finissait toujours par être renversé dans l'ampleur de ses gestes expansifs et généreux.

Sa tenue était un amalgame de cuir et de métaux martelés avec une précision nanique.
Sa peau autrefois bronzée était à présent comme du caramel clair tanné.
Il aimait à fumer des sortes de gros rouleaux de feuilles diverses qui lui donnaient une haleine de chacal (Il les nommait ses "Poulettes", allez savoir pourquoi !).

Une cicatrice en forme de croix barrait le haut de l'arrête de son nez et deux anneaux d'or pendaient à ses lobes d'oreille.

Sur ses gants de cuir noirs, à son annulaire, il on pouvait voir briller une chevalière en platine sertie d'un rubis à l'intérieur duquel une rune était prisonnière. Cette chevalière faisait l'objet d'un mystère, mais personne n'osait aborder ce sujet car le dernier à l'avoir fait l'avait amèrement regretté.

De l'autre côté de la pièce, se trouvait un groupe de trois personnes toutes aussi importantes pour la "Famille".

La première était une humaine vêtue d'une robe très stricte d'un bleu noir tout aussi austère.
Sa chevelure d'un roux flamboyant formait une masse de boucles indisciplinées qui retombait jusqu'au creux de ses reins. Elle formait un contraste étonnant entre l'austérité de sa tenue et la folie de sa coiffure.

Son visage avait des traits fins, un nez aquilin et des grands yeux expressifs d'un violet passé par le temps.
Sa bouche était recouverte d'un maquillage bordeaux.
Sa peau était comme celle d'une statue de marbre.
A son cou, un monocle pendu à une chaîne en or tombait devant son jupon.
Son nom dans la "Famille" était "L’intendante". Seul le "Père" connaissait son véritable nom, les autres restant dans l'ignorance.

Elle avait la charge de toute la maisonnée et elle restait une énigme. "L’intendante" avait toujours un comportement approprié envers les membres de la "Famille", mais jamais elle ne répondait à une question la concernant.
Ainsi, certains jasaient sur sa condition, allant élaborer des récits aussi improbables que stupides.
Mais visiblement, l'intéressée s'en moquait et ne s'attachait qu'à accomplir les tâches incombées à sa charge.
Et dans ce domaine, elle était ce que l'on appelle "une perle".

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A sa gauche, se trouvait un elfe sombre dont la taille de près de deux mètres l'obligeait à se pencher pour écouter les murmures de sa voisine.
Il avait des cheveux blancs noués en queue de cheval élégante.

Il portait une tenue de cuir noir qui semblait lui coller à la peau tant elle était serrée.
Par dessus, un manteau ample de couleur violine à la structure résolument moderne pour l'époque masquait les deux fourreaux où se trouvaient deux sabres mortels. Dans sa botte, une dague était dissimulée et d'autres "joujoux" se trouvait à l'abri au cas où.

Son visage était aimable, presque doux et on ne pouvait nier qu'il était racé.
Ses yeux était d'un gris pluvieux et il portait trois améthystes à son oreille gauche.

Une broche représentant des ronces entrelacées autour d'un médaillon ovale semblable à celui que porte sa "Maîtresse" s'affichait au col de sa tenue de cuir.
Il portait des gants en velour pourpre et il était connu au sein de la "Famille" sous le nom de "Valet".
Et Valet n'était jamais loin de celle qu'il servait, tout le monde le savait.

La troisième personne de ce trio était un humain au regard mélancolique. Il semblait tout droit sortie d'une œuvre classique, peinte par un illustre artiste qui aurait cherché à représenter de la façon la plus fidèle sa vision de l'innocence.

On pouvait noter que bien des regards s'égaraient sur sa personne.
Il se dégageait de lui une aura sombre qui contrastait avec sa beauté angélique.
Sa chevelure blonde et bouclée entourait ses traits de façon harmonieuse.

Nul défauts dans ce visage, juste un rêve.
Ses gestes étaient gracieux, tout en gardant leur virilité.

Ses habits étaient d'un blanc pur, rehaussés par des liserés d'or.
Il portait une sorte de tunique longue sur un pantalon serré et des chausses lui arrivant à mi-mollet.

Ganté, il affichait quelques anneaux d'or travaillés tout en délicatesse.
Ils étaient les seuls bijoux visibles sur lui.

Noué à un cordon doré, un livret pendait à son côté gauche.
Sa peau était laiteuse et ses yeux aux cils blonds avaient la couleur de l'or ambré.
Ils devaient certainement être marron à l'origine.

Son nom au sein de la "Famille" était "Arkhel" mais tous le surnommaient "Le Scribe".

Au delà de sa beauté, Arkhel était ce que l'on nomme un "érudit".
Il était celui vers qui on pouvait se tourner lorsqu'une question philosophique venait nous tarauder.

Il gérait la bibliothèque de la "Famille" avec un soin religieux.
Il était aussi celui qui retranscrivait l'histoire de la "Famille" pour la gloire du "Père".

C'était aussi un arcaniste redoutable même si très peu l'avaient vu à l’œuvre au sein de la cour des miracles.
Mais nul n’aurait osé remettre en question ce fait car derrière son air innocent, tous savaient qu'Arkhel cachait une personnalité effrayante et on pouvait le comparer à une belle plante vénéneuse qui dévorerait tout insecte naïf.

Ainsi, dans cet antre qui était rempli de faux semblants, se trouvaient les principaux membres qui formaient le noyau dur de ce monde invisible aux yeux des mortels.

Ce lieu se nommait "Le Labyrinthe de Gaus" et peu se doutaient que sous leurs pieds se trouvait une galerie de monstres avides de sang.

Pour la "Famille", l'humanité n'était qu'un vivier où s'agitait un gibier à la saveur incomparable.
Il n'y avait pas de pitié, juste de l'amusement dans ce milieu là, comme le chat qui jouerait avec la souris.
Sauf qu'ici, la souris, c'était vous, pauvres mortels !

Ainsi se refermait le rideau sur cette pièce qui n'était qu'une toute petite partie du labyrinthe.
Une tenture de velours rouge... Rouge sang !

Un membre de la "Famille" avait été volontairement omis de cette petite mise en bouche pour les curieux.

Un peu de patience serait nécessaire car le prochain chapitre nourrirait une part du mystère concernant 'Le Taxidermiste".

Mais voudrait-on vraiment allez voir derrière la porte alors ?

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Il serait sage de se souvenir des paroles de notre malheureux voleur :
...suivez mon conseil et ne cherchez pas à vous aventurer plus loin car vous pourriez bien trouver plus que ce que vous n'aimeriez trouver.
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Re: Histoire de vampires

Message par Anamorphose »

L'amorce
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Il approche de son pas rassurant.
L'enfant le regarde avec ses grands yeux. Son visage est sans expression.

Quelque chose bouge dans les bras de "Père".
Une lueur de curiosité traverses les iris de la petite humaine.
Elle reste étonnamment calme lorsqu'elle découvre ce qui bouge.

Il se baisse, pour avoir son visage à sa hauteur, et lui tend un adorable petit louveteau.
Elle hésite un instant, ses yeux trahissent plusieurs sentiments : méfiance, intérêt, attirance.
Elle se décide à réceptionner l'animal dans ses bras.
Puis elle regarde "Père".

- Tu va devoir veiller sur ce loup avec beaucoup d'attention, Adora. Tu seras responsable de lui. Tu devras le nourrir, le promener, l'amuser et le dresser. Tu devras aussi lui donner un nom. Tu as bien compris ?

- Oui, "Père".

Il sourit, révélant ses canines immaculées.

- Je compte sur toi, Adora. Ne me déçois pas. Tu sais ce qui arrive quand tu me déçois.

Sa voix est douce comme du miel, l'enfant tressaille, puis se fige.

- Je ne vous décevrais pas, "Père".

- Alors tout va bien ma "Fille". Je vais m'absenter durant plusieurs mois. Valet s'occupera de continuer ton éducation. Tu l'écouteras et tu feras ce qu'il te demande avec beaucoup d'attention. A mon retour, je vérifierai que tu as travaillé avec acharnement. Je ne tolèrerai aucun échec.

- Bien, "Père".

Il se relève alors, son regard toujours rivé à celui de l'enfant qui a maintenant la charge d'un louveteau innocent. Il reste un instant à la fixer ainsi, puis il lui tourne le dos, commençant à partir.
Une ombre surgit à sa suite, lui emboitant le pas.
Les deux disparaissent, laissant l'enfant et le loup dans un silence lourd.

Une main gantée se pose sur l'épaule de la fillette.

- Nous avons une leçon à travailler, ma Dame.

La voix de l'elfe sombre est comme un chuchotement.

- Ne perdons pas de temps alors.

Le ton de la petite est déterminé. Ils n'ont que trop traîné.
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La leçon

Le louveteau est devenu loup. Son nom est "Krall". Il suit sa maîtresse fidèlement. Il la défend avec férocité. Elle compte tellement pour lui.

Adora s'est attachée à son loup. Il est devenu son ami. Elle veille sur lui avec férocité. Il compte tellement pour elle.

Ils fixent "Père" qui se tient debout devant eux.
Son regard va de l'un à l'autre, mais il est impossible de lire ce qu'il pense.
Dix ans se sont écoulés.
Le "Voyage" de "Père" a effectivement duré des mois et des mois.
Mais à présent, il est de retour.

Il s'approche d'Adora.

Le loup ne bouge pas. Il reste à côté de sa maîtresse, le regard vif. Il suffit d'un geste et il la défendra sans aucune hésitation. Il n'aime pas cette créature. Elle sent une odeur désagréable.

- Dis-moi, Adora... Tu aimes Krall ?

- Oui, "Père".

- Parfait.

La jeune fille fixe "Père" avec intensité. Elle est heureuse de son retour en son fort intérieur. Elle est aussi méfiante.
Il fait très froid dehors et la neige tombe sur elle qui ne porte qu'une simple robe blanche.
Valet se tient légèrement en retrait, du côté opposé à Krall.

"Père" approche encore.

- Je t'ai ramené un présent de mon voyage.

Adora tressaille.

- Je suis certain qu'il sera inoubliable pour toi, ma "fille".

Un rictus fend sa bouche alors que son regard perce les prunelles de la jeune fille.
Il plonge sa main dans la neige et en sort un long coffret en ébène qu'il tend à Adora.

Elle s'en saisit, intriguée et songeuse.
Elle regarde "Père" qui sourit comme pour l'encourager à l'ouvrir.
Elle tâte le coffret comme cherchant un piège quelconque, mais il semble normal.
Elle l'ouvre et observe.

A l'intérieur, il y a une dague dont l'aspect indique qu'elle est précieuse.
Sa lame luit très légèrement d'une énergie verdâtre.
Adora a un haut le cœur en voyant la couleur.
Elle lève son regard vers "Père".

Il sourit toujours.
Ce n'est plus un rictus, mais un sourire doux. Doux comme le miel.
Elle ressent alors un frisson qui s'évertue à contaminer tout son corps.

"Père" se penche et il lui murmure quelque chose à l'oreille.
Adora prend petit à petit la teinte de la neige qui l'entoure.
Elle opine comme le ferait un automate, une larme glissant sur sa joue de marbre.
La seconde suivante, elle saisit la lame, se tourne et égorge Krall.
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La révélation


Elle ouvre les yeux.
Il y a quelque chose qui la gêne.
C'est lourd.
Ça écrase son ventre et sa poitrine.
Elle regarde et elle hurle.

Sur le drap qui la recouvre, Krall la fixe.
Ses yeux sont étranges.
Ils sont figés.
Il ne bouge pas.
Il n'exprime plus rien.
Krall est mort.

Le hurlement cesse.
Il laisse place au silence pesant.
Elle regarde l'animal qu'elle a tant aimé.
Mais c'est lui qui la fixe.
Est-il revenu pour la hanter ?
Est-il revenu pour la culpabiliser ?
Non.
Krall est mort.
Krall ne pense plus.

Elle tend la main pour le toucher.
Il est dur.
Il ne bouge pas.
Elle essaye de comprendre.
Son esprit est vif.
Et elle comprend alors.
Elle n'a plus cette peur panique.
Elle a une "révélation" !

Elle soulève le loup empaillé et descend du lit.
Elle le porte dans un coin de sa chambre.
Elle choisit sa place.
Elle le caresse doucement.
Elle le trouve magnifique ainsi.
Il restera éternellement à ses côtés.

La porte s'ouvre.
"Père" entre.
Il semble contempler la scène.
Son regard semble sourire à la jeune fille.
Est-il vraiment satisfait ?
Elle ne saurait le dire pour l'instant.
Elle aime "Père".
Elle aime "Père" bien plus que Krall.
Elle lui sourit.
Un sourire doux comme le miel.
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Message par Anamorphose »

Le "Musée"



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- C'est... Magnifique !

Je regardais la vitrine avec une sorte de ravissement enfantin.
Ce que je voyais me fascinait.
Cela représentait une scène.
Une scène surréaliste.

Je m'attardais sur les détails de la poupée.
Il y avait quelque chose en elle que je n'arrivais pas encore à définir.
Quelque chose qui provoqua un frisson le long de ma colonne, frisson issue d'un mystère qui planait encore.

Je voyais les colombes dans leur prison étrange.
Elles semblaient si réelles.
Et je songeais à la symbolique même de cette sorte d'enfantement irréel.
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Soudain, je sursautais.
J'avais senti un souffle d'air sur ma nuque et je me retournais vivement.

- Je ne voulais pas vous effrayer. Ma Dame vous attend. Je vais vous conduire.

Je fixais le grand elfe sombre avec la même fascination que lorsque j'avais posé mes yeux curieux sur l'une des nombreuses vitrines habillant le long couloir que nous avions emprunté.
Jusqu'à aujourd'hui, j'ignorai même qu'un tel lieu puisse vivre sous mes pieds.
Un lieu oublié par le temps et où je découvrais des trésors d'architecture à chacun de mes pas.

- Ne la faisons pas plus attendre. Je vous suis, Valet.

Le tapis qui étouffait mes pas devait, rien qu'à lui seul, avoir demandé des heures de travail au plus habile artisan de la cité.
Je suivais mon guide, ne pouvant m'empêcher d'examiner chaque détours, me retenant pour ne pas m'arrêter devant les dizaine de scènes de ce musée si étrange.

Notre marche ne semblait finir et je tentais d'estimer la longueur de notre parcours.
Mais je ne voyais pas de limites, ni devant moi, ni derrière.
A un moment, nous arrivâmes à un croisement.
Valet pris le couloir de droite et après ce qui me parût une éternité, il s'arrêta devant une immense porte à double battant.
Il me semblait entendre comme un chant étouffé venant de l'autre côté.
Je dressais l'oreille, charmé par les quelques notes que je pouvais percevoir.
Charme interrompu alors par mon interlocuteur lorsqu'il utilisa le heurtoir.

Le bruit qu'il fit résonna dans tout l'espace qui nous entourait et j'eus à nouveau un sentiment de malaise.
J'essayais de le repousser et je me concentrais sur la porte.
C'est alors qu'elle s'ouvrit et que le temps s'arrêta.

Elle venait de me couper le souffle par cette simple apparition.
Il me semblait que tout venait de se figer et que seule, elle pouvait se mouvoir, balayant par sa grâce tout ce que j'avais pu croire beau auparavant.
Je sentais mes tempes qui battaient violemment, comme si mon cœur allait me trahir et que mes jambes allaient s'affaisser.

De toutes les œuvres que j'avais pu découvrir, aucune ne pouvait égaler celle qui venait à ma rencontre, menue et semblant si fragile que j'avais l'impression qu'un seul de mes regards pouvait la briser.
Et cette idée seule me rendait la vie insupportable en cet instant précieux.

Cependant, autre chose semblait se superposer à cette vive émotion.
Quelque chose que la partie de mon esprit encore lucide essayait de me faire comprendre.
Quelque chose qui dénotait avec ma vision.
Et sur le moment, je ne voulu pas y faire attention.
Car elle approchait de moi et plus rien ne comptait.

Je la dépassais aisément d'une tête et demi, et lorsqu'elle me parla, il me fallu baisser mon regard pour la contempler.
Sa voix était comme un murmure suave, mais chacun de ses mots se détachaient clairement à mes oreilles.
Et ses premières phrases, alors que son regard me vrillait littéralement, ne furent pas pour moi, mais pour Valet, ce qui fit monter en moi une forme de frustration profonde.

- Tu as inspiré ma prochaine œuvre, Valet. Les orchidées fleurissent sous la rondeur de Séléné. Va !

Le sens de ces mots m'échappaient.
Cependant, à l'instant où elle les prononçait, mon compagnon semblait s'être volatilisé, ce qui, je dois l'avouer, me ravît car je me retrouvais alors en tête à tête avec mon hôtesse.
Il me fallu prendre sur moi pour me reprendre et la saluer comme un gentilhomme se devait de le faire.
Je prenais délicatement sa main gantée et approchait mes lèvres à un cheveux du velours pourpre.

- Je suis honoré, Dame Von Hoffman, de pouvoir enfin vous rencontrer.

Elle ne me répondait pas, alors je relevais la tête pour la regarder, craignant d'avoir fait quelque impolitesse ou mégarde.
Elle me fixait d'une façon si intense, que je sentis la chaleur affluer à mes joues, instant que je maudis, n'ayant que rarement eu l'occasion de perdre ainsi mes moyens.
Puis j'oubliais tout lorsqu'un sourire aussi doux que le plus fabuleux des nectars se peint sur ses lèvres à l'ourlé délicat.
Ce sourire valait toutes les politesses d'usage. Il était comme une invitation.
Elle pencha la tête d'une façon qui me la rendait bien plus admirable encore et son regard me rendait prisonnier de ses moindres intentions.
Alors elle prit ma main, reculant dans un léger frisson de soie, me faisant pénétrer dans ce que Valet avait appelé l'Atelier.

Ce n'est que lorsque la porte se referma dans mon dos que ma raison eut un sursaut et alors, je compris ce que pendant tout ce temps, je m'étais refusé à voir.
Et avant que l'horreur ne me fige, je sentis quelque chose de froid sur ma gorge chaude.
Et quand l'extase m'emporta, étouffant le cri qui s'apprêtait à sortir de mes lèvres, je n'eus que brièvement conscience combien je voulais m'accrocher à la vie.
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Le corps tomba mollement sur le sol.
Elle essuya délicatement ses lèvres avec un mouchoir brodé de ses initiales, puis la porte s'ouvrit.
Valet entra et il souleva le corps pour le déposer doucement sur la table en métal.
Sa maîtresse semblait satisfaite et c'est tout ce qui comptait.

Elle reprit la comptine, la mélodie accompagnant ses gestes usuels.
Le scalpel en main, elle en avait pour plusieurs heures de travail précis.
La peau devait être retirée avec le plus grand soin avant de passer dans les multiples bains.

Valet s'occupa de servir les cinq tasses de thé fumant que sa maîtresse aimait avoir lorsqu'elle créait ses poupées.
Il remit de l'ordre dans ses instruments. Il savait combien elle tenait à ce que tout soit rangé. Et tout ce qui importait à Adora, lui importait.
Il déposa trois mouchoirs soigneusement pliés et en cascade parfaite.
Puis il se retira.

Dans le couloir, il dépassa une vitrine vide.
Il eut un de ses rares sourires.
Bientôt, le musée offrirait une nouvelle pièce de choix.
Une poupée un peu trop parfaite, qui semblerait prête à vivre et qui fascinerait d'autres regards naïfs.
Une poupée de chair.
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"Nous sommes les prédateurs de la nuit.
Ne fermez pas un oeil, de peur qu'on ne vous nuit."


(Extrait de la "Comptine de Falst",
auteur oublié du temps passé et révolu)
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Message par Anamorphose »

A l'intérieur

"Il faut toujours bien faire ce qu'on fait, même une folie."
(Honoré de Balzac)

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Lame or...


Pour comprendre l'esprit d'Adora, il fallait comprendre un système de strates imbriquées les unes dans les autres.
Il fallait imaginer son âme construite comme des poupées gigognes dont la plus petite se trouverait à l’extérieur de la plus grande.
Cette dernière étant l'essence même d'une folie profonde, d'un monde dans un enchevêtrement de mondes.

La première strate était celle de ce que le premier regard devait voir, superficialité était son nom.

La seconde strate était celle que le regard plus instinctif pouvait percevoir, lucidité du sixième sens.

La troisième strate était celle que seul un regard aiguisé et connaisseur analysait, l'intelligence carnassière.

La quatrième strate était celle qu' un dément à la folie proche du génie pouvait comprendre dans toute sa mégalomanie, son absence totale de moralité et sa monstruosité .

Mais la cinquième strate...
La cinquième strate, elle...
L'idée même de son existence était une utopie.
Et pourtant, elle existait belle et bien.
La cinquième strate était à l'origine de tout.
Le noyau dur du monde désarticulé et complexe d'Adora Drakaine.

Ce monde, ignoré de l'humanité, avait la forme d'une immense voute à l'architecture envoutante, dérangeante et fortement improbable.
Des milliers de compartiments tapissaient ses parois, chacun ayant une identité visuelle propre.

Dans l'air, le fantôme d'une petite comptine flottait, son écho résonnant parfois légèrement plus fort.
Mais si on bougeait ne serait-ce qu'un cheveux, d'autres mélodies s'imposaient, certaines symphoniques, d'autres résolument modernes.

Au milieu de la voute, faisant cercle, ce qui ressemblait à des "Portes" dansait et tremblait.
Derrière chacune d'elles se trouvait un labyrinthe contenant des visions à la réalité comme sublimée visuellement, extrêmement nettes.
On y retrouvait aussi quelques scènes de son passé, se réalisant en boucle, le plus petit détail mémorisé.

Et puis, il y avait, flottant dans l'air, trois êtres asexués, à la fois irrésistiblement beaux et profondément perturbant par l'aura qu'ils dégageaient. Une aura indéfinissable, à la fois mélange de répulsion ultime et d'attirance foudroyante.

Ces trois êtres étaient la clé même du mystère enfermé dans l'infime partie la plus pure de l"humaine au visage d'ange.

Et c'était en ce lieu que vivait la véritable Adora. Sa "Maison".
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A l'intérieur...
Il n'y avait plus rien d'important.
Son regard dardé sur le plafond ne percevait que vaguement la fresque qui représentait un orchestre masqué, dont les musiciens étaient des marionnettes aux larmes sanglantes.

A l'intérieur...
Un vague tambour, un rythme régulier, courant sur la partition de son éveil d'infante.
Elle n'est plus que sensation.
Frisson d'une chair, tourbillon dans l'âme, lorsque son corps n'appartient plus au sol de marbre noir.

A l'intérieur...
Elle peut respirer son parfum, qu'elle reconnaît avant même qu'il ne franchisse le seuil.
La morsure de ses lèvres figées est tel un étaux dont elle ne souhaite jamais se défaire.
Toute fin serait... Insupportable !

A l'intérieur...
L'élixir de vie, ce fluide intime, mute, transforme la chrysalide en papillon.
Est-ce un tocsin qui résonne ?
Faites-le taire !
Je ne veux pas l'entendre.

A l'intérieur...
La mort m’enivre, l'air suffoque, se crispent mes phalanges à son bras si sur.
Scellée, il est mon anathème, le gardien de ma résurrection.
Si seulement aimer m’était conté, alors peut-être...
Mais je suis son ultime pied de nez au créateur.
Némésis...

A l'intérieur...
Mes ailes grandes ouvertes assombrissent la pièce.
NON !
Tu ne peux cesser de prendre !
Cela n'est que le commencement...
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D'un "Père"...


Il déposa le corps avec toute la douceur dont il pouvait faire preuve, et combien il savait y faire !

Il contempla son œuvre, d'un regard qu'on aurait pu prendre pour bienveillant, si on ignorait à quel point tout cela était dénué de la moindre innocence.

Son sang ancestral commençait à dévorer ce qu'il restait de l'humanité, si on pouvait supposer que l'humaine en ait jamais eu une, de la silhouette sculptée par son esprit tourmenté et calculateur.

"Père" venait d'accomplir le premier acte d'une pièce magistrale dont il était le maître manipulateur.

Dans un coin d'ombre, Cyfer observait, imperturbable.
Les bras croisés, il aurait pu passer pour une statue de marbre. Nul n'aurait songé à s'en méfier.
Jusqu'à ce très doux mouvement d'air, juste avant que son sabre ne vous coupe en deux dans le sens de la longueur.

Naïf celui qui ose penser qu'un vampire, aussi séduisant soit-il, puisse avoir le moindre soupçon d'amour en lui.
Idiot est celui qui croit voir un peu d'âme dans l'illusion de gestes, en vérité, fort bien étudiés.
Suicidaire est l'esprit qui se laisse emporter par les doux mensonges du prédateur affamé.

Car ne nous y trompons pas, ce carnassier à l'allure faisant tourner les têtes envoutées ne voit en vous, pauvres mortels, que le calice d'un met de choix dont il abusera sans aucune pitié.
A moins que... Vous ne lui serviez.

Oui...
Cyfer regardait "Père" de ce regard sans illusion aucune.
La raison de sa loyauté indéfectible appartenait à un des nombreux plan de son maître.
Il le savait et il l'acceptait.
Et peut-être, oui, peut-être que l'on pouvait supposer que cela était sa façon d'apprécier son créateur.
Un sentiment qui ne ressemblait en rien à la vision romantique que l'on se fait de l'affection portée à autrui.
Non, c'était quelque chose de terriblement pragmatique.

"Père" s'approcha du lit, puis déposa un baiser sans vie sur le front de son infante.
Puis il tourna les talons de ses bottes lustrées pour quitter la pièce sans une seule parole.
Cyfer vint tout près du corps en train de renaître à leur vie.
Il posa un genou à terre, puis saisit la main fine de la jeune femme et la posa contre son front.
Il ferma les yeux, dans un hommage dont la promesse secrète ne dépasserait jamais ses lèvres.

Lorsque Valet vint remettre de l'ordre dans la pièce, celle-ci était vide.
Il ne restait que ce parfum léger à l'effluve inoubliable.
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Message par Anamorphose »

La légende de Gaus, l'architecte maudit et le labyrinthe sanglant

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Musique

Artebald Gaus n'était pas beau.
Mais il s'avéra très tôt qu'Artebald était doué pour créer des architectures.
Déjà tout petit, sa chambre était un capharnaüm de croquis, empilements divers, constructions étranges et j'en passe.

Il sauta aussi précocement aux yeux de ses parents que le petit Artebald n'était pas... Comme les autres enfants.
Son degré de sociabilité était proche du zéro absolu et il semblait vivre dans un monde retranché dans lequel seul l'être élu pouvait songer, un jour, partager avec lui la clé.

Et il arriva que l'être élu soit... Un autre garçon étrange, à la timidité maladive, déconnecté de ses camarades enfantins, parlant souvent en prose.
Oui... Artebald Gaus tomba follement sous le charme de celui qui allait habiter sa vie durant près de 24 ans : Lanchester Malleboge.

Lanchester, dont l'oeuvre poétique écorchée vive ne sera à peu près comprise que par les plus grands esprits littéraires, la plèbe rejetant le jeune artiste avec une férocité qui bouleversera l'ordre des choses dans l'univers déjanté de Gaus, le conduisant à la création du célèbre Labyrinthe.

Les liens qui naquirent entre le tout jeune Artebald et Lanchester furent tels une évidence.
Contrairement à Artebald, Lanchester était un jeune garçon d'une beauté foudroyante. Mais sa fragilité émotionnelle était un vrai calvaire pour lui.
Elle en faisait une proie facile pour les enfants cruels et dominateurs, et il arriva souvent que l'enfant subisse des sévices.
Jusqu'au jour où il rencontra Artebald.

Si Artebald était d'une laideur évidente, il était tout aussi évident qu'il possédait un charisme prenant aux tripes et un côté dominateur qui en faisait un leader.
Nombres d'enfants, de plus le craignaient car malgré sa nature sèche, ses poings avaient la dent dure.
Et même si il n'était pas très grand, sa férocité lorsqu'on le cherchait était proche de la folie furieuse.
Aussi, les autres enfants ne l'approchaient pas, ce qui, d'ailleurs, l’arrangeait terriblement.
Ainsi, quand il prit Lanchester sous son aile, ce dernier ne subit plus jamais la moindre humiliation.
Et ils grandirent dans leur monde à part, sous les regards chuchotant des biens pensants qui se révèlent souvent bien pires dans leur actes que le plus vil des brigands.

Artebald fit de brillantes études, toutes en rapport avec l'architecture et il lui fut très facile de s'enrichir grâce à une clientèle fortunée ou à la très haute noblesse.
Son talent était si grand que les gens en oubliaient sa laideur ou les rumeurs qui couraient sur son étrange caractère et ses mœurs contre-nature.
Si Lanchester c'était montré tout aussi brillant dans son cursus d'apprentissage, ses œuvres ne connaissaient pas le même sort.
En effet, le poète maudit demeurait incompris, voir fustigé par le peuple.
Seules quelques très rares personnes semblaient comprendre l’ampleur de son art et l'apprécier.

Bien que l'amour que portait Artebald à Lanchester était d'une pureté absolue, prit par sa passion, il ne vit pas que ce dernier s'étiolait, sa flamme diminuant jusqu'au jour tragique où, dans la solitude de leur demeure, il se pendit.
Et ce jour là, le monde d'Artebald bascula.

Il annula tous ces chantiers, la grande bâtisse où leur amour avait connu ses plus beaux jours ferma définitivement ses volets et on ne revit plus jamais Gaus.
Il couru beaucoup de bruits sur cette disparition, allant du plus simple au plus improbable.
Mais personne n'avait la moindre idée de combien ils étaient loin du compte.

Lorsque le seul être qu'il ait jamais aimé plus que lui-même retira la lumière de ses yeux, une part d'Artebald sombra dans le néant et une autre part de lui naquit.
Et, un soir, un évènement arriva.
Ce soir là, fut le tout premier contact de Gaus avec "La Famille" et "Père".

Durant des années, Artebald avait été maintenu en surveillance sans le savoir.
Tout comme il ignorait que son travail avait été passé à la loupe, certaines de ses commandes passées par des fidèles de "La Famille" ou même indirectement influencé par "Père".
Gaus bénéficiait d'une étrange protection et, le soir où Lanchester se suicida, son "Protecteur" su que le moment était venu.

"Père" avait quelque chose à lui proposer.
Une sorte de marché.
Dans le plus grand secret, le corps de Lanchester avait été retiré de la terre et confié à un groupuscule de nécromanciens maîtres dans leur art sombre.
"Père" ramènerait Lanchester à la vie, mais Gaus devrait oeuvrer pour "La Famille" et s’atteler à la construction "de sa vie".
Et, dans un moment de folie, Artebald signa le pacte qui allait faire de lui l'architecte maudit.

Il avait eut une vision.
Il construirait un immense dédale sous le sol même de la cité. Un lieu secret, qui serait ignoré des mortels. Un lieu où l'on pourrait se perdre.
Et c'est bien ce qu'il se passa.

Dès que le chantier commença, quelque chose de sombre se mit en marche.
Quelque chose d’indicible, mais de vivant, à sa façon.
Régulièrement, des ouvriers disparaissaient. On ne retrouvait rien d'eux malgré les recherches et cela commença à rendre les hommes nerveux.
Cependant, la rémunération était si alléchante que beaucoup, malgré leur peur, firent passer la fortune avant la raison.
Et le "Labyrinthe" se construisit sur le sang de ces hommes durant des centaines d'années.

Afin de traverser les époques, "Père" transforma Artebald, l'introduisant ainsi au sein même de "La Famille".
Artebald, lui, se partageait entre son travail incessant et la triste marionnette qu'était devenue son Lanchester.
La folie prit le dessus sur ce qui lui restait de raison et il se mit à parler de choses étranges.
Il évoquait le labyrinthe comme une entité vivante qui avait son propre esprit et qui lui inspirait quoi faire.
On le voyait parfois surgir d'une pièce qui n'était pas là la veille, puis disparaître pendant des jours.
Il semblait le seul à savoir toujours s'y retrouver entre les murs sombres.

Le temps passa et des vampires commencèrent à disparaître à leur tour.
Ce fait ne plu pas du tout à "Père" et une terrible confrontation eut lieue entre lui et Gaus.
Certains s'en souviennent encore et disent que les murs en tremblèrent.
Le soir même, Artebald et Lanchester furent déclarés disparus.
Mais jamais les vampires ne les retrouvèrent.
Il s'étaient comme... Volatilisés.
C'est à ce même moment que les disparitions cessèrent.
C'est aussi à partir de ce moment que la légende connu sa fondation.
Il fut dit que le labyrinthe avait emporté son créateur, que les murs construits dans le sang était maudits et que quelque part, ils retenaient prisonniers tous les disparus.

Et, de nos jours, sous le sol que foule les vivants, sans le savoir, un monde effrayant vit.
Un monde où il arrive que, parfois, au détour d'un couloir, on croit entendre comme des coups de marteau.
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Message par Anamorphose »

Le carnet rouge

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La bougie vacillait de temps en temps sur le bureau d'ébène parsemé d'un désordre soigneusement entretenu.
Silhouette carmine, le visage baissé sur le vélin traumatisé par les âges, Adora martyrisait une plume.

Son écriture chaotique, aussi déchiffrable que celle d'un médecin dans ses mauvais jours, tachait les feuillets du mystérieux carnet rouge.
Pourtant, oh combien elle s'appliquait !
Mais ses pattes de mouches engluées dans un malström scriptural relevaient du défit pour tout bon lecteur.

Et ce qu'il aurait pu découvrir alors ne l'aurait pas plus avancé que de vouloir comprendre pourquoi un lièvre a été crée avec deux grandes oreilles et une queue en forme de pompon.
Sur toutes les pages, il n'y avait que des prénoms, suivis par une série de chiffres.


Les derniers en date étaient les suivants :
Spoiler
  • Mael 1260
  • Jolan 8571
  • Vélik 8360
  • Gulgar 6130
Quand elle eut fini sa besogne, elle souffla pour faire sécher l'encre, puis resta un moment songeuse, observant les dernières entrées.
A l'instant qui lui sembla opportun, elle le referma d'un geste vif, qui fit presque s'éteindre la bougie.
Elle se leva et se dirigea vers une porte.
Lorsqu'elle l'ouvrit, une longue pièce sans fond visible apparue, dont chaque côté des murs étaient recouverts de... Carnets rouges.
D'un pas glissant, elle alla déposer son bien dans un emplacement encore vierge avant de sortir, refermant à clé derrière elle.

Un sourire aux canines aiguisées et carnassières déforma son visage encore angélique une seconde auparavant, la faible lueur de la pièce accentuant les ombres sur ses traits.
Ainsi, toute sa nature de prédateur resplendit dans la solitude de sa chambre aux murs sanglants.
La traine de sa robe d'intérieur mourait lentement sur le marbre noir, souillant ce dernier d'un rouge éloquent.

A vrai dire, pourtant, sa satisfaction était très loin d'être réelle.
Il manquait quelque chose.
Quelque chose d'important.

Elle se dirigea vers un drôle d'échiquier composé tel un puzzle en trois dimensions.
Il y avait 7 parties en cours sur 7 niveaux.
Les pions étaient étranges.
Sculptés dans une pierre translucide, on pouvait y insérer un second pion d'obsidienne ou de cristal blanc.
Elle déplaça seulement deux pièces avant de regagner son baldaquin.

En frôlant son bureau, elle acheva la flamme, ses yeux se dilatant dans l'obscurité.
Sa main saisit une poupée désarticulée et effrayante au passage, juste avant que son corps ne vienne reposer sur les draps de soie.
Alors que ses paupières s'offraient à un sommeil de plomb, Valet vint la border, déplaçant doucement ses longues mèches de jais afin d'en entourer son visage.
Un visage à qui, en cet instant, on aurait donné le bon dieu sans confession.
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"Le hasard n'existe pas...
Le hasard... C'est moi !"

"Codex Vampirique" par Beör Anwamanë
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Message par Anamorphose »

Morsures
Le corps du messager tomba mollement sur le marbre noir de l'immense chambre.
Elle venait de desserrer ses mains fines, accrochées comme un étau mortel alors que ses lèvres s’enivraient du fluide vital du malheureux.

Elle pourléchât le sang qui tâchait sa bouche délicate, un long frisson parcourant sa colonne alors qu'elle remettait de l'ordre dans ses longues mèches d'ébène.
Valet lui remit la lettre, ainsi que le paquet.
Il s'occupa ensuite de la coquille humaine vide, s'éclipsant avec elle.

Adora décacheta la missive et ses prunelles parcoururent rapidement les quelques lignes.
Son visage d'ange ne reflétait aucune émotion.
Elle défit le paquet, découvrant l'or, ainsi que les pièces composées de sang de dragon.
Une heure passa avant qu'elle n'émette un seul mouvement.

Une fois ce temps écoulé, elle se leva, sortit de sa chambre et longea plusieurs couloirs avant d'arriver à une petite porte en trompe l’œil encastrée dans le mur.
Elle exerça cinq pressions à divers endroits de la fresque et un grincement résonna dans l'air, la porte s’entrebâillant.
Elle pénétra dans l'ombre de la pièce dont les murs anciens recouverts d'un champignon fluorescent dévoilèrent une sorte de grenier abyssal.

Glissant sur le sol ancien comme un fantôme, elle se déplaça jusqu'à une étagère comportant trois cloches de verre immaculées.
Elle déposa sous chacune d'elle, dans l'ordre, le courrier, l'or et enfin, les pièces composées de sang de dragon.
Une fois cela fait, elle reprit le chemin en sens inverse, l'étrange petite porte se refermant derrière elle, se fondant dans la fresque du couloir.

De retour dans son antre, elle éclata d'un rire sinistre si puissant que la voute trembla.
La chose était si inhabituelle que tous les vampires alentours se figèrent.
Tous, sauf un : un rictus au coin des lèvres, "Père" parti d'un petit rire amusé.
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Message par Anamorphose »

Solitude
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Spoiler
[flash(0,0)]
Perchée sur la plus haute tour de Rune, juste vêtue d'un linceul bleu profond, son regard sans âge fixait les rues où les quelques passants de la nuit se hâtaient.

Sa chevelure serpentine formait un long chemin dans la brise nocturne.
Elle avait cerné de noir ses grands yeux qui dévoraient son visage à la chair un peu trop pâle.
Sur ses lèvres onctueuses, un rouge vif tranchait, faisant ressortir le bleu pervenche de ses prunelles assassines.
Un parfum subtil s'entortillait en volutes suaves autour de son corps menu.
La lune se reflétait dans ses iris, lueur diffuse et fantomatique.

Un vol de chauves-souris surgit brusquement, rompant le silence.
Chères amies de toujours, elle tourbillonnèrent en cœur avant de rejoindre le lointain.
A l'horizon, des gros nuages joufflus se zébraient d'éclairs tonitruants.
Une odeur de pluie parvenait à son odorat sensible.
Un délicieux frisson électrisa sa peau de marbre glacial.
Rien ne pouvait égaler la nuit.

Un craquement, puis l'assourdissante promesse d'un orage terrible s'emparèrent de la cité libérée.
Libérée... De quoi ?
Elle retînt un rire dément.
L'onde outragée léchait déjà son immortelle carcasse.
Mais elle ne sentait rien.
C'était bien cela le problème.

Cela faisait longtemps qu'Adora avait perdu son humanité, si elle en avait jamais eu une un jour.
Sa vie n'était, au fond, qu'une immense mascarade. Sa mort l'était encore plus.
Elle ne saurait jamais ce que le mot "liberté" signifierait.
Si nul ne les voyait, ses chaînes étaient pourtant si lourdes que seul un enfant de la nuit pouvait en supporter le poids.

La... Liberté !
Quelle utopie !
La liberté des uns se faisait toujours au détriment des autres.
Elle en avait eu plus d'une fois la preuve au cours de ce demi millénaire.
Une envie irrépressible d'écraser un crâne juteux entre ses mains s'empara de son être.
Oui, le prochain ou la prochaine qui parlerait de liberté, elle lui serrerait sa petite tête mortelle jusqu'à sentir jaillir le fluide chaud sur ses mains fines aux ongles aiguisés comme des serres.
A moins que les globes oculaires fassent un "plop" avant de pendre sur les joues molles.
Elle trouvait cela amusant quand ça "plopait".

La vérité, c'était qu'elle haïssait tout ces êtres formant le bétail qui lui permettait, combien c'était hilarant, de ne pas respirer.
Un vaste terrain de chasse, remplit de médiocres tous autant qu'ils étaient.
Alors elle les observait.
Une sorte de distraction morbide, sachant que la finalité de la chose les amèneraient tous à fertiliser le sol d'Ether.

Dès le départ, au moment même où la vie avait fait crier ses poumons, son âme s'était retrouvée du côté obscur de l'univers.
Et c'était certainement pourquoi "Père" l'avait trouvé sur un tas d'ordures.
Il n'y avait pas que le sang qui courait dans ses veines décédées : il y avait l'essence même du mal.
Elle était une teigne, la pustule sur le visage le plus immaculé, dénuée de compassion, se nourrissant du malheur des autres, jubilant alors même qu'elle s'amusait cruellement avec ses proies.
Pourquoi aller chercher l'enfer quand ses portes étaient largement grandes ouvertes ici bas ?

Elle méprisait profondément tous les croyants, surtout les plus inspirés.
Adora ne croyait en rien.
Tout au plus, enfilait-elle un masque pour faire illusion face à la crédulité de certains, quand il s'agissait de... Croire !
Et le jour où son éternité prendrait fin, elle ne souhaitait que le néant.
Ignorer même qu'elle ait pu exister un jour.
Le rien ultime.

Une main à la blancheur inquiétante vint effleurer sa joue de velours.
Il était là, tout contre elle, humant l'exotique et envoutant parfum.
"Père"...
Était-il possible qu'un vampire puisse avoir des faiblesses ?
Évidemment !
Elle le laissa faire. Comme toujours...
Ses chaînes à elle avaient le doux visage d'un elfe à la chevelure plus profonde que la nuit la plus noire.
Il avait tout pouvoir sur elle et elle le haïssait avec ferveur pour cela.
Et combien il s'amusait de cela.

Au loin, l'aube faisait jouer ses trompettes et son regard se figea sur les couleurs éblouissantes.
Sélène avait cédé une fois de plus et elle devait replonger dans les entrailles de la terre fraîche et protectrice.
Il la prit dans ses bras comme si elle n'était qu'une brindille, puis ils disparurent avant que les premiers rayons ne touchent les premiers pavés de cette Rune "libérée".
Vraiment, combien les mortels pouvaient être naïfs...
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Anamorphose
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Re: Histoire de vampires

Message par Anamorphose »

Implantation

Ses pas glissaient sur la neige immaculée.
L'arrivée ne s'était pas déroulée comme prévue.
Mais, à présent, elle se trouvait exactement au bon endroit.

Elle avait longuement parcouru la cité.
Elle s'en imprégnait, mais pas seulement.
Elle commençait à rassembler les pièces d'un puzzle qui prendrait du temps à finir.

Ses malles ne tarderaient pas à arriver, une fois que le point d'encrage serait acquis.
Stéréotype...
Du fin fond des entrailles de la terre, elle partit d'un rire qui fit vibrer les parois de son nid.
C'était si facile...

Alors qu'elle en riait encore, Valet vint coiffer sa longue chevelure à présent défaite.
Ses anglaises d'ébènes encadraient son visage d'ange hilare.
L'elfe sombre prenait grand soin de cette toison délicate.
Il était à nouveau près de sa maîtresse et plus rien n'était important.

Stéréotype...
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